mardi 17 juin 2014

Le patriarcat institutionnalisé.


Il n’y aurait pas de lumière dans les foyers où la mère travaille, a déclaré ce mardi Benkirane devant la chambre des conseillers.
Ainsi, toi, femme qui aspire à travailler, à construire un projet quel qu’il soit, voici comment le chef du gouvernement te perçoit.

Sans doute celui-ci est soucieux du bien-être des femmes marocaines et nostalgique d’une certaine époque où elles étaient « beaucoup plus heureuses et épanouies » lorsqu’elles attendaient sagement que leurs enfants (ou du moins les garçons d’entre eux !) et leur tendre mari rentrent à la maison après une dure journée de labeur.
Elles trouvaient du réconfort dans le simple fait de réduire leur journée à un atelier cuisine-ménage, dans le fait de se sacrifier pour leur famille, quoi.
D’ailleurs, elles ne manquaient de rien, n’avaient pas besoin de travailler puisque leur mari les fournissaient en denrées alimentaires nécessaires à leur activité quotidienne susvisée et donc à leur bonheur. Parfois, il les gratifiait de quelques dirhams pour un bain au hammam bien mérité (les femmes en profitaient pour se tirer les cheveux les unes des autres, parce qu’elles sont des femmes et qu’elles aiment ça).
À défaut de riche époux, celles-ci pouvaient compter sur leurs frères qui, parce qu’ils héritent le double, assuraient leur survie matérielle.

Trêve de plaisanterie.

Ce que Benkirane n’a pas compris, c’est qu’en 2014, la société n’est pas tout à fait la même qu’au moyen-âge.
Ainsi, les dames tentent tant bien que mal d’être indépendantes par le travail. Beaucoup d’entres elles aiment le fait de sortir le matin, travailler et retrouver leur famille le soir.
Beaucoup d’entres elles, en revanche, n’aiment pas leurs conditions de travail, le harcèlement dont elles peuvent faire l’objet, les inégalités dont elles sont incontestablement les victimes en matière de salaire, d’égalité des chances, etc.  mais sur ça, Benkirane ne semble pas avoir d’opinion … ni de propositions.

Quel projet de société le gouvernement porte-t-il pour les femmes ? Quelle citoyenne le gouvernement imagine-t-il pour le Maroc d’aujourd’hui et de demain ?

À ce jour :

-      -  Le mariage des mineurs ;
-      - La non-abrogation de lois pénales obsolètes et profondément injustes ;
-      - Le report de la réforme contre les violences faites aux femmes ;
-      -  Des nominations aux hautes responsabilités de l’État contraires à la parité et donc à la constitution ;
-      - ET J’EN PASSE ET DES MEILLEURES.

Autant d’échecs portant une atteinte grave à la dignité des femmes qui, rappelons-le, sont bel et bien des êtres-humains.

Le gouvernement oublie que beaucoup travaillent depuis la nuit des temps dans le milieu rural où elles jouaient exactement le même rôle que les hommes. Seules pouvaient s’offrir le luxe de ne pas travailler celles qui appartenaient à des familles aisées.
Nombreuses sont celles qui arrivent aujourd'hui à allier travail et vie de famille et même à mener une vie associative par laquelle elles contribuent au développement du Maroc. Ces femmes, parfois divorcées, sont de vrais chefs de famille, qui ne comptent que sur le fruit de leur travail pour nourrir leurs enfants. Leurs enfants se portent la plupart du temps très bien et sont ambitieux, à l’image de la mère qu’ils ont eu la chance d’avoir.

Le gouvernement oublie également les conséquences désastreuses d’une politique économique qui voudrait se priver, purement et simplement, de 50% de la population active. Dans un pays comme le Maroc, c’est intenable…

Peut-être Benkirane a-t-il peur de cette nouvelle génération de femmes éduquées, de femmes travailleuses qui osent revendiquer l’égalité entre les sexes et leur liberté, qui s’imposent en tant que membres à part entière de la société. Peut-être que Benkirane ne voit pas en ces femmes un électorat potentiel et cherche à les annihiler.
Ce que Benkirane ignore, c’est que les femmes aujourd’hui n’accepteront pas la soumission et se battront pour leurs libertés. Il vaudrait donc mieux ne pas trop les mettre en colère.

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